Histoire des Juifs de Tunisie
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A Tunis :

En rapide survol : l'histoire des juifs de Tunisie

Les Juifs apparaissent avec la naissance de l'histoire de la Tunisie, et en font corps.
Les Juifs de Djerba affirment même être installés dans leur île après la destruction du premier temple et la légende dit qu'ils auraient refusé à Ezra de retourner en Judée et de reconstruire le deuxième Temple, sachant à l'avance, que ce deuxième Temple serait détruit, à son tour.
Il semble très probable que dès l'époque de la fondation de Carthage, des tribus Juives se soient installées en Afrique du Nord.
Ne va t'on pas jusqu'à dire que Salambo n'est autre que " Chalom Pô " La paix ici, et ne trouve t'on pas à Gammarth des stèles avec les symboles judéens.
Carthage, de sa fondation en l'an 813, à sa chute en 146 avant Jésus-Christ, devait influencer l'Afrique du Nord tout entière et se rapprochait des Phéniciens dont elle avait la langue et les mœurs, et par là des Juifs.
La Pax Romana allait permettre aux communautés juives d'Afrique du Nord, la libre circulation entre les diverses communautés de la Lybie et de la Tunisie jusqu'à l'Algérie et le Maroc.
Ce sera une prospérité réelle sous les empereurs romains jusqu'au milieu du 4e siècle et que décroîtra avec les empereurs romains convertis au christianisme. Cela durera, de restriction en restriction, jusqu'à la conquête musulmane.
L'invasion arabe de Tunisie date de 648.
On connaît le rôle de la KAHENA, Princesse Juive, de son véritable nom DEYA BENT NIFAK COHEN. Elle s'opposera à la conquête arabe et sa défaite et sa mort semblent bien avoir marqué la fin de la prospérité des communautés juives.
Ces communautés, dira CHOURAQUI, à partir du 7e siècle vogueront sur une mer d'incertitude et la conquête arabe se poursuivra en Algérie, au Maroc, en Espagne et jusqu'en France où elle s'arrêtera avec Poitiers en 732.
Dès le 8e siècle, le cœur de la communauté juive de Tunisie, battra à Kairouan, qui sera le pôle de la connaissance. Mais Kairouan sera ville interdite au 11e siècle, ce qui signifie probablement que sa population a été convertie par la force.
Mais d'autres centres de culture se succéderont à Kairouan, disséminés à travers le pays.
L'événement important après la disparition de Kairouan est l'expulsion des Juifs de la péninsule Ibérique qui devait avoir lieu le 31 juillet 1492.
Le Judaïsme tunisien verra arriver de nombreux juifs espagnols qui donneront un regain de vie intellectuelle et religieuse à la communauté.
Cette même communauté, à qui l'entrée à Tunis, était autorisée sans le droit d'y coucher ou d'y habiter, verra s'ouvrir les portes de la capitale à une " Hara " ou Quarteron de juifs, grâce à un Malekit Sidi Mahrez Ben Khalf.
Sidi Mahrez s'est penché sur le sort des Juifs et autorisé par le Bey de l'époque, à créer à l'intérieur la ville, un quartier Juif contigû à la Médina ou quartier arabe.
La légende veut que ce quartier fut créé à l'endroit le bâton de SIDI MAHREZ, lancé de son minaret, torr dans un terrain inhabité.
Quelle que soit la véracité de cette légende, il demeure qu'elle était profondément ancrée dans l'esprit des habitants et il me plait de me souvenir que lorsque BOURGUIBA visitera la Hara en février 1957, je lui offris comme présent, une reproduction en Or et Argent du Minaret de Sidi Mahrez.
Or, lui dirai-je pour la puissance et argent, pour la miséricorde et la grâce. Ainsi s'exprimera notre Tradition.
La Cohabitation à Tunis, des Granas et des Touansas c'est-à-dire des Livournais et des autochtones ne fut pas toujours heureuse.
Le schisme se produira en 1710 avec le grand rabbin Isaac LUMBROSO mais l'unité, elle, se fera avec un dé beyiical du 7 février 1944.
Les Espagnols débarquèrent à leur tour en Tunisie sous CHARLES QUINT. Cela durera une courte péric qui se terminera en 1574 avec la souveraineté de l'empire Ottoman qui durera jusqu'à l'occupation française, s en 1881, en fait et en 1919, avec le traité de Sèvres en droit.
Cette occupation par la France allait changer les horizons de vie de la communauté.
L'Alliance Israélite précédera l'occupation française d'abord en 1863, avec la création du premier comité régional de l'Alliance, puis avec les cinq écoles l'Alliance, trois à Tunis, une à Sousse, et une à Sfax, la première étant inaugurée rue MALTA SGHIRA 1878.
Jusque là, la communauté était gérée par ses rabbi qui désignaient eux-mêmes les " Guizbarims " ou " Gabaims ".
La présence française et le souci que la France avait de l'amélioration des conditions matérielles et morales du judaïsme tunisien amènera :
1. la création en 1898 d'un tribunal rabbinique avec président, et greffier.
2. la création d'un comité de bienfaisance nommé par l'autorité.
Le tribunal fonctionnera à la rue des Tanneurs à Tunis, jusqu'en 1956 date à laquelle il disparaîtra pour laisser place à la juridiction laïque.
Les comités de bienfaisance laisseront place en 1922 à des conseils de communauté élus au second degré. La population élisant un corps électoral de 60 personnes, qui devaient à leur tour élire un exécutif ou conseil de la communauté de 12 membres soit : 9 Tunisiens et 3 Granas. Les élections auront lieu, successivement en 1922 - 1926 - 1930 - 1934 - 1937, avec l'alternance traditionalistes et progressistes.
Lors de la guerre de 1939, puis de l'avènement du régime de Vichy et à l'arrivée des Allemands, un comité provisoire devait être nommé pour remplacer l'ancien comité élu que la mobilisation générale avait éparpillé. Avec des fortunes diverses, ce comité provisoire fera face aux exigences allemandes jusqu'à la Libération du 7 mai 1943 Quelques jours après cette libération, le maréchal JUIN alors encore général, remettra en place le comité élu en 1937, qui gérera les affaires de la communauté jusqu'en 1947. C'est à cette date qu'un nouveau conseil sera élu auquel succéderont les conseils élus en 1951 et 1955. Deux événements devaient changer la face du judaïsme tunisien :
- d'une part la résurection d'Israël en 1948
- d'autre part, l'indépendance de la Tunisie en 1956.
Le premier événement par 1' Alliah spontanée qu'il provoquera amenuisa la population juive qui était de l'ordre de 125.000 âmes et l'indépendance de la Tunisie allait accélérer ce mouvement.
Non point que cette indépendance était tournée contre les communautés juives mais les structures nées de l'indépendance paralysaient les activités commerciales et industrielles des Juifs de Tunisie. De plus cette communauté avait été traumatisée par la disparition de sa juridiction religieuse et d'autre part par la dissolution, par une loi organique, du conseil de la communauté élu en 1955.
Cette dissolution était voulue par l'autorité, parce que le conseil de la communauté n'avait pas donné son approbation à la désafectation du grand cimetière de l'avenue Roustan qui constituait une enclave très vaste et dont le gouvernement devait faire un jardin.
Le conseil de la communauté s'y refusa : il fut dissout par la loi du 13 Juillet 1958.
Le même jour, le grand Rabbin intérimaire de Tunisie était titularisé dans son poste par la seule autorité laïque, et le cimetière sera un jardin.
Ce qui restait de la communauté juive de Tunisie, s'amenuisera encore avec les événements de Bizerte en 1961, puis avec la guerre des 6 jours en 1967 et l'incendie d'une aile de la grande synagogue de l'avenue de Paris, incendie dans lequel périront les archives de la communauté.
A l'heure où nous sommes, la communauté ne doit pas dépasser 3.000 âmes dont le quart se trouve encore à Djerba et la plus grande partie dans la capitale.
Il y a peu de jeunes dans cette population, lesquels jeunes vont en France parfaire leurs études ou en Israël effectuer leur alliah. Cette communauté disparaîtra, ou, au contraire se maintiendra-t-elle et, un jour, se retrouvera t'elle dans la prospérité ? La solution se trouve au Moyen-Orient. Si la paix s'installe comme chacun le souhaite, entre Israël et les Pays Arabes, bien des Tunisiens souhaiteraient retrouver dans le calme et la sérénité les sources de leurs pères et de leurs aïeux.
Cet article ne peut donc se terminer que sur un espoir de paix pour tous et en particulier, pour une communauté, qui a vécu 25 siècles sur le même sol, et que les aléas de la politique a éloignée de ses sources historiques, dont elle garde, sous tous les cieux où elle se trouve, actuellement, une profonde nostalgie.
Charles Haddad 1986

Etat de la population tunisienne d'après les recensements
Années
Total
Juifs tunisiens
Européens
Musulmans
%
1921 ...
2.093.939
47.711
156.115
1.826.515
2,3 %
1926 ...
2.159.708
53.022
173.281
1.864.908
2,5 %
1931 ...
2.410.692
55.340
195.293
2.086.762
2,3 %
1936 ...
2.608.313
59.222
213205.
2.265.750
2,3 %
1941*
--
68.268
--
--
--
1946 ...
3.230.952
70.971
239.549
2.832.978
2,2 %
1956 ...
3.783.169
57.792
255.324
3.383.904
1,5 %
* Recensement établi uniqument pour les Juifs sous les ordres du gouvernement de Vichy; il comprend aussi bien les Juifs tunisiens que francais et étrangers.
Source : "Regards sur les Juifs de Tunisie" par Robert ATTAL et Claude SITBON -ALBIN MICHEL

Population juive tunisienne par année et par localité
Localités
1909 (a) 1921 1926 1931 1936 1946 1956 1976
Ariana 153 1.373 1.169 2.637 2.619 3.128 2.678  
Béjà 540 1.140 1.035 986 998 1.011 620 20
Ben Gardane 234 314 313 458 489 675 365 85
Bizerte 1.125 1.522 1.390 1.250 1.342 1.037 958 15
Djerba
3.000
3.779
3.828
4.098 4.109 4.294 2.684 1.100
Gabès 1.271 2.523 2.495 2.459 2.552 3.210 2.252 70
Gafsa 250 636 695 663 577 639 320  
Hammam-Lif 57 345 394 283 543 674 489  
Kairouan 483 294 270 236 226 168 82  

La Goulette
et Carthage

825 1.540 2.057 843 1.668 3.641 3.327  
La Marsa 324 360 334 285 131 405 290  
Le Kef 750 784 812 891 807 357 313  
Moknine 699 595 616 635 651 612 125  
Monastir 405 195 168 166 142 124 33  
Nabeul 1.560 1.545 1.737 1.795 1.912 2.058 1.161 115
Nefta 20 143 86 154 148 131 12  
Sbeitla 18   81 134 146 128 89  
Sfax 2.722 3.3331 3.265 3.058 3.466 4.223 3.168 205
Sousse 2.681 3.531 3.728 3.672 3.741 3.574 3.282 320
Soliman 212 195 188 137 182 161 65  
Tunis 24.000 19.020 24.131 25.399 27.345 34.194 32.000 4.600
(a) : D'après E. VASSEL, le Juif à l'intérieur de la Tunisie.
Source : "Regards sur les Juifs de Tunisie" par Robert ATTAL et Claude SITBON - ALBIN MICHEL

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